Mardi, Février 15 2011 18: 29

Inspection du travail

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La convention (no 1978) de l'OIT sur l'administration du travail, 150, et sa recommandation connexe (no 158) constituent la base du développement et du fonctionnement de tout système moderne d'administration du travail. Ces deux instruments internationaux constituent une source d'orientation très utile et une norme par rapport à laquelle toute administration nationale du travail peut comparer son orientation, son rôle, son champ d'application, ses structures et ses fonctions, ainsi que ses performances réelles.

L'administration du travail s'occupe de la gestion des affaires publiques dans le domaine du travail qui, dans son sens traditionnel, peut s'entendre de toutes les questions relatives à la ressource humaine économiquement active, quel que soit le secteur. Il s'agit d'un concept large, mais soutenu par la convention n° 150, qui définit l'administration du travail comme « les activités de l'administration publique dans le domaine de la politique nationale du travail ». Ces activités comprendraient généralement les éléments suivants :

  • formulation de politiques impliquant la préparation de lignes directrices pour de nouvelles initiatives
  • rédaction de lois et de réglementations du travail comme moyen de donner une expression positive aux politiques du travail
  • planification des programmes, projets et activités à l'appui des interventions politiques
  • l'élaboration de politiques, impliquant la rédaction et l'invitation à des discussions sur de nouvelles initiatives
  • la mise en œuvre des politiques, impliquant l'application de la législation du travail et la fourniture de services consultatifs sur la manière de se conformer à la législation du travail
  • suivi et évaluation des politiques
  • fournir des informations et sensibiliser sur les questions de politique du travail et de législation du travail.

 

D'après cette définition globale, il ressort que l'administration du travail peut couvrir plus que les responsabilités et les activités d'un ministère du travail typique (emploi, affaires sociales, etc.) dans la mesure où «le domaine de la politique du travail peut s'étendre à divers ministères, départements, organismes parapublics ou d'autres ministères publics en dehors du travail ».

Il faut donc penser en termes d'administration du travail combustion propre composé de divers composants liés ou interagissant de la même manière, pour former une unité synergique. L'élément fédérateur commun est politique du travail, et cela inclut toutes les activités menées sous sa responsabilité. Cela variera d'un système national à l'autre (pour des raisons historiques, politiques, économiques, sociales ou autres), mais peut généralement inclure les éléments suivants : relations professionnelles, inspection du travail, sécurité du travail, hygiène du travail, indemnisation des accidents du travail, services de l'emploi, la promotion de l'emploi, la formation professionnelle, l'orientation et le conseil, les tests et la certification des métiers, la planification du personnel, l'information sur l'emploi et les professions, les travailleurs étrangers et les permis de travail, la sécurité sociale, les groupes vulnérables et défavorisés, les statistiques du travail, et bien d'autres éléments.

Il en ressort qu'un système d'administration du travail tend à être complexe, qu'il nécessite une coordination à tous les niveaux pour remplir son objectif et qu'il est dynamique dans la mesure où, selon la convention n° 150 de l'OIT, il couvre tous « organismes de l'administration publique » et « tout cadre institutionnel » concerné par la politique nationale du travail. Enfin, il ressort de cet ensemble de normes internationales que l'inspection du travail devrait faire partie intégrante de l'administration du travail, et que dans le domaine de la protection du travail (qui inclut mais va bien au-delà de la sécurité et de la santé au travail), l'inspection du travail est l'instrument opérationnel de tout système d'administration du travail pour assurer le respect de la politique et de la législation nationales du travail. Pour citer un ancien directeur général du BIT : « Une législation du travail sans inspection est un essai d'éthique plutôt qu'une discipline sociale contraignante.

Deux niveaux d'inspection du travail

L'inspection du travail, en tant qu'élément de l'administration du travail, est en règle générale organisée à deux niveaux: les bureaux d'inspection sur le terrain consacrés principalement à l'action et l'autorité centrale chargée de l'élaboration et du suivi des politiques, ainsi que de la planification et de la gestion des programmes. Les services extérieurs et l'autorité centrale doivent évidemment travailler en étroite collaboration.

Services sur le terrain

L'inspection du travail exerce ses fonctions d'inspection et de conseil par l'intermédiaire des services extérieurs qui en constituent le socle. Celles-ci lui donnent l'avantage sur les autres services d'être en contact direct avec le monde du travail au niveau de l'entreprise, avec les employeurs et les ouvriers, la population active du pays.

A l'inverse, la réalisation d'inspections dans les entreprises met l'inspection en mesure de fournir à l'administration centrale des informations détaillées, recueillies lors de visites ou de réunions avec les partenaires sociaux et non accessibles autrement, sur le climat social, les conditions et l'environnement de travail ou les difficultés de l'application de la législation : insuffisance de l'action dissuasive des tribunaux, problèmes avec les autorités régionales, pression exercée par certaines entreprises en raison de leur rôle économique, et manque de coordination dans le travail des différents services publics. Les services extérieurs sont également bien placés pour mettre au jour, comme l'exigent les normes internationales, les vices ou abus non couverts par les dispositions légales.

En vertu de la convention n° 81 de l'OIT sur l'inspection du travail dans l'industrie et le commerce (1947) (et, en vertu de l'article 2, sur les mines et les transports), les inspecteurs des bureaux locaux sont tenus « de soumettre à l'autorité centrale... des rapports périodiques sur la résultats de leurs activités d'inspection ». Cette disposition, qui figure également dans la convention n° 129 (convention sur l'inspection du travail (agriculture), 1969) laisse aux Etats une grande latitude pour déterminer la forme, le contenu et la fréquence des rapports. Cette disposition est cependant essentielle pour assurer un contact permanent entre les inspecteurs et l'organisme central et pour tenir celui-ci informé de la situation économique et sociale des régions et lui permettre de définir et d'orienter la politique nationale d'inspection, ainsi que d'établir un rapport annuel sur les activités des services d'inspection pour diffusion nationale et dans le temps avec les obligations internationales.

L'autorité centrale

L'autorité centrale dirige l'inspection du travail (ou, dans le cas de nombreux pays fédéraux, les inspections d'Etat) et assure sa place dans l'appareil administratif du ministère chargé de l'administration de la politique du travail et de l'administration d'Etat. L'exécution des tâches d'inspection ne dépend en effet pas uniquement de l'initiative personnelle des inspecteurs, même si celle-ci reste d'une importance fondamentale. Les inspecteurs du travail ne travaillent pas isolément ; ils font partie d'une administration et exécutent un ensemble d'objectifs d'entreprise nationaux.

La première étape de la direction est d'établir un budget, de le faire adopter et de l'administrer. Le budget reflète les choix sociaux du gouvernement ; son montant détermine l'ampleur des moyens accordés aux prestations. La concertation avec les organisations syndicales, qui ont un intérêt à l'efficacité de l'inspection, peut être importante de ce point de vue.

Diriger, c'est aussi définir une politique de protection du travail, élaborer les principes du travail d'inspection, fixer un ordre ou une priorité en fonction des caractéristiques des diverses branches d'activité et du type d'entreprises et des résultats qu'elles obtiennent , de rationaliser les activités (politique d'exécution), de perfectionner les méthodes et le programme, d'encourager et de coordonner les différents services, d'évaluer les résultats et de faire des suggestions pour améliorer le fonctionnement de l'inspection.

C'est l'autorité centrale qui doit donner aux services extérieurs des instructions suffisamment claires pour assurer une interprétation cohérente et homogène des dispositions légales sur l'ensemble du territoire. Cela se fait généralement au moyen d'une politique nationale globale d'application, souvent (et de préférence) conçue en consultation avec les organisations de partenaires sociaux les plus représentatives. Enfin, il doit gérer le personnel, veiller à la formation et au perfectionnement (politique de formation), assurer l'indépendance et le respect de l'éthique professionnelle et évaluer périodiquement le travail des agents.

Aux termes des conventions nos 81 et 129 de l'OIT, l'autorité centrale doit établir un rapport annuel, dont les éléments essentiels sont indiqués aux articles 20 et 21, sur le travail des services d'inspection. La publication de ces rapports dans les 12 mois suivant la fin de l'année à laquelle ils se rapportent permet aux travailleurs, aux employeurs et aux autorités concernées de se familiariser avec le travail d'inspection. La communication de ces rapports au Bureau international du Travail dans les trois mois suivant leur publication fournit la matière d'une étude extrêmement utile des systèmes mis en place et des résultats obtenus dans les Etats Membres et permet aux services compétents du BIT de rappeler aux gouvernements leurs obligations, si besoin est. Malheureusement, cette obligation, qui s'impose à tous les Etats membres ayant ratifié la convention, est trop souvent ignorée dans la pratique.

Il reste à l'organe central à transmettre les informations reçues des services d'inspection aux organes consultatifs mis en place au sein du ministère (par exemple, le comité national de sécurité et d'hygiène ou le conseil des conventions collectives), aux ministères concernés et aux partenaires sociaux. Il doit également utiliser ces informations lui-même et prendre les mesures appropriées, soit dans les travaux d'inspection, soit dans l'élaboration des lois et règlements. Au total, cette activité de publication est un moyen très utile pour l'inspection du travail de documenter ses activités et ses réalisations aux niveaux national et international.

Collaboration technique

Les conventions nos 81 et 129 de l'OIT prévoient que des dispositions appropriées doivent être prises pour promouvoir la coopération entre les services d'inspection du travail et d'autres services gouvernementaux ou institutions publiques ou privées engagés dans des activités similaires.

Collaboration avec d'autres services de l'administration du travail

Une collaboration doit d'abord s'établir avec les autres services de l'administration du travail, tant centraux que locaux. Les problèmes traités par l'administration du travail — conditions de travail, santé et sécurité, salaires, emploi, relations de travail, sécurité sociale et statistiques — sont souvent étroitement liés et doivent être considérés comme un tout.

L'autorité centrale doit échanger des informations et contribuer à l'élaboration d'une politique commune et d'orientations communes pour les décisions du ou des ministres compétents ou d'un organe central de planification. A l'échelle locale, l'inspection du travail doit entretenir des contacts réguliers, notamment avec les services de l'emploi, ceux qui s'occupent des travailleurs étrangers et ceux qui s'occupent des relations du travail (lorsque ceux-ci relèvent de services spécialisés).

Dans les pays où il existe différents services d'inspection du travail relevant d'un même ministère (comme en Belgique) ou rattachés à différents ministères, une collaboration très étroite doit être organisée pour l'échange d'informations, la spécification de méthodes ou de procédures d'action et l'élaboration de règles communes programmes d'actions. L'efficacité du travail effectué par plusieurs services est directement liée à la qualité de la coopération entre eux, mais l'expérience montre qu'en pratique une telle coopération est très difficile à organiser et demande beaucoup de temps et de ressources, même dans les meilleures circonstances. Il a donc presque toujours tendance à être un deuxième meilleur choix. Elle tend également à rendre l'approche holistique nécessaire à prévention comme objectif principal de l'inspection du travail très difficile.

Collaboration avec l'administration de la sécurité sociale

Dans de nombreux pays, des pans des services de sécurité sociale, notamment ceux chargés de l'indemnisation des accidents du travail et de l'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, s'occupent de la prévention des risques professionnels. D'autres fonctionnaires spécialisés effectuent des contrôles dans les entreprises pour voir quelles mesures de santé et de sécurité doivent être appliquées. Dans certains pays (Australie (Nouvelle-Galles du Sud), Zimbabwe), l'inspection du travail est en fait gérée par le système de sécurité sociale. Dans d'autres (France, Allemagne), ils gèrent un système d'inspection séparé et parallèle. Dans d'autres encore (Suisse), l'inspection nationale du travail est remboursée au prorata des activités d'inspection consacrées à la prévention en matière de sécurité et de santé au travail dans les entreprises. Si l'action des agents de la sécurité sociale n'est pas directement adossée, comme celle de l'inspection du travail, à l'autorité de l'État, sauf lorsqu'il s'agit de fonctionnaires, comme en Nouvelle-Galles du Sud ou au Zimbabwe, elle s'accompagne de sanctions pécuniaires sous forme de augmentation des cotisations pour les entreprises ayant un taux d'accident élevé qui ne suivent pas les conseils donnés. En revanche, les entreprises qui font un réel effort de prévention peuvent bénéficier de cotisations réduites ou avoir des prêts à des conditions particulières pour poursuivre leur travail. Ces mesures incitatives et dissuasives (bonus-malus système) constituent évidemment un moyen efficace de faire pression.

La collaboration entre les services de la sécurité sociale et de l'inspection du travail est essentielle, mais pas toujours facile à établir, même si les deux relèvent généralement mais pas nécessairement du même département ministériel. Cela tient en grande partie à l'attitude d'administrations plus ou moins indépendantes, fermement attachées à leurs prérogatives. Lorsque l'autorité de contrôle est pleinement efficace et que la coordination est réalisée, les résultats, notamment en termes d'action préventive et de maîtrise des coûts, peuvent être remarquables.

La collaboration avec l'autorité centrale doit être manifeste dans l'échange d'informations, l'utilisation des données et l'élaboration conjointe de programmes de prévention. Localement, la collaboration peut prendre diverses formes : enquêtes conjointes (en cas d'accident par exemple), échange d'informations et possibilité d'utiliser les équipements des services de sécurité sociale (souvent bien mieux dotés d'un point de vue financier) pour le travail inspection.

Collaboration avec des organismes de recherche, des organismes techniques et des experts

L'inspection du travail ne peut rester isolée ; elle doit être en contact étroit avec les organismes de recherche ou les universités pour suivre l'évolution technologique et les progrès des sciences sociales et humaines, obtenir des informations spécialisées et suivre les nouvelles tendances. La collaboration ne doit pas être unilatérale. L'inspection du travail a un rôle important à jouer vis-à-vis des organismes de recherche ; il peut leur indiquer certains sujets d'étude et les aider à tester les résultats sur le terrain. Les inspections du travail sont parfois invitées à participer à des séminaires ou colloques sur des questions sociales, ou à dispenser un enseignement spécialisé. Dans de nombreux pays (par exemple, la République fédérale d'Allemagne, la Fédération de Russie ou le Royaume-Uni), une telle collaboration, parfois régulière, s'avère très utile.

Dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail, l'inspection du travail doit soit agréer, soit collaborer avec les organismes agréés pour effectuer la vérification technique de certains types d'installations et d'équipements, lorsqu'ils existent (appareils sous pression, engins de levage, installations électriques). Dans d'autres pays, comme l'Afrique du Sud, c'est encore largement l'inspection du travail elle-même qui s'en charge. En faisant appel régulièrement à ces organismes externes, elle peut obtenir des avis techniques et observer les effets des mesures préconisées.

Les problèmes rencontrés aujourd'hui par l'inspection du travail, en particulier dans les domaines technique et juridique, sont si complexes que les inspections ne pourraient assurer pleinement l'inspection des entreprises sans l'aide de spécialistes. La convention n° 81 exige des États qu'ils prennent les mesures nécessaires « pour s'assurer que ... des experts techniques et des spécialistes, y compris des spécialistes en médecine, ingénierie, électricité et chimie, soient associés aux travaux d'inspection ... dans le but d'assurer la l'application des dispositions légales relatives à la protection ... de la santé et de la sécurité ... et à la recherche des effets des procédés, des matériaux et des méthodes de travail ». La convention no 129 contient une disposition similaire.

Il n'en demeure pas moins que les multiples aspects des conditions de travail sont étroitement liés - des recherches récentes ne font que le confirmer - et que les services d'inspection du travail doivent pouvoir les traiter dans leur ensemble. Pour cette raison, l'approche multidisciplinaire, qui permet de combiner les avantages de la spécialisation et de la polyvalence là où les ressources financières sont adéquates, apparaît particulièrement prometteuse.

Autorités régionales ou départementales

Dans presque tous les pays, le territoire national est divisé en un certain nombre de circonscriptions appelées par des noms différents (régions, provinces, cantons, départements), elles-mêmes parfois subdivisées en circonscriptions plus petites, dans lesquelles l'autorité centrale est représentée par des hauts fonctionnaires (par exemple, des gouverneurs ou préfets). Les personnels des services extérieurs des différents ministères relèvent souvent de ces hauts fonctionnaires en ce qui concerne le statut de la fonction publique et l'information sur la politique, et ce sont souvent leurs hauts fonctionnaires qui installent les inspecteurs du travail dans leurs fonctions lors de leur nomination. Les inspecteurs (ou, s'ils existent, les directeurs départementaux, provinciaux ou régionaux du travail) devraient ensuite tenir ces hauts fonctionnaires informés de tout événement dont ils devraient avoir connaissance. De même, les inspecteurs doivent collaborer avec ces fonctionnaires pour leur fournir, directement ou par l'intermédiaire de leur personnel immédiat, toute information dont ils ont besoin. Toutefois, les inspecteurs doivent toujours relever de leur ministre, généralement le ministre du travail, par l'intermédiaire de leur supérieur hiérarchique (le directeur départemental, provincial ou régional), en ce qui concerne le contenu de leur travail, leur manière de l'exécuter et leur rendre compte de ses résultats.

Cela peut placer les inspecteurs du travail dans une situation délicate, car les fonctionnaires représentant l'autorité centrale sont rarement bien informés des fonctions de l'inspection du travail et ils peuvent être tentés, notamment dans certains conflits, de fonder leur décision sur des considérations d'ordre public et social. paix. Les inspecteurs du travail doivent souligner l'importance de l'application générale de la législation du travail lorsqu'il s'agit de celle-ci et, si des difficultés surgissent, ils doivent en référer à leurs supérieurs.

Autorités judiciaires

Les inspecteurs du travail entretiennent normalement des relations administratives régulières avec les autorités judiciaires, dont le soutien est indispensable pour prévenir les infractions. Dans la plupart des pays, les inspecteurs n'engagent pas eux-mêmes les poursuites, c'est la prérogative du parquet du ministère de la justice. Lorsqu'ils constatent une infraction et qu'ils estiment de leur devoir de la poursuivre contre l'employeur, ils rédigent un procès-verbal d'irrégularité auprès du parquet. Ce procès-verbal est un document important qui doit clairement établir l'infraction en indiquant la disposition violée et les faits constatés par l'inspecteur. Le parquet a généralement le pouvoir discrétionnaire soit de donner suite au rapport et d'engager des poursuites, soit de classer l'affaire.

On voit non seulement combien il est important de rédiger le procès-verbal d'irrégularité, mais aussi combien il peut être souhaitable que les inspecteurs et les agents du parquet se rencontrent, ne serait-ce qu'une seule fois. L'inspecteur du travail qui constate une infraction a généralement tenté, avant de recourir à cette mesure, d'user de persuasion comme moyen de faire respecter les dispositions légales. Les agents du parquet et les magistrats n'en sont pas toujours suffisamment informés et c'est souvent la méconnaissance des méthodes de travail des inspecteurs qui les conduit à prononcer des peines insignifiantes ou à classer l'affaire. C'est pourquoi les échanges interministériels sont également indispensables au plus haut niveau.

Il existe d'autres circonstances dans lesquelles les inspecteurs du travail peuvent être en contact avec la justice, par exemple si un renseignement leur est demandé pour l'instruction d'une affaire ou s'ils sont cités comme témoins lors d'un procès. Il est important pour eux de recevoir communication du texte complet des arrêts (y compris les motifs invoqués), dès que les arrêts sont rendus. Cela leur permet de signaler la récidive de l'infraction, si l'infraction perdure ; si l'affaire est classée sans suite ou si la sanction prononcée apparaît insuffisante, elle permet à l'inspection de demander au parquet de faire appel. Enfin, la communication est d'autant plus utile que le jugement fait jurisprudence.

Autres autorités

Les inspecteurs du travail peuvent être amenés à entretenir des contacts réguliers ou sporadiques avec diverses autres autorités publiques. Ils peuvent être invités, par exemple, à coopérer avec les services de planification du développement. Leur rôle sera alors d'attirer leur attention sur certains facteurs sociaux et sur les conséquences possibles de certaines décisions économiques. En ce qui concerne les personnalités politiques (maires, parlementaires, membres du parti), si les inspecteurs du travail doivent recevoir de leur part des demandes d'information par exemple, il importe qu'ils gardent l'impartialité qui doit être leur règle de conduite et fassent preuve d'une prudence accrue . Des procédures pour les relations avec la police doivent également être établies, par exemple pour contrôler les heures de travail dans les transports publics routiers (seule la police a le droit d'arrêter les véhicules) ou en cas de suspicion de travail immigré illégal. Il doit également y avoir des procédures, souvent inexistantes, pour garantir aux inspecteurs le droit d'entrer sur les lieux de travail, si nécessaire avec l'aide de la police.

Relations avec les organisations d'employeurs et de travailleurs

Les services de l'inspection du travail entretiennent naturellement des relations étroites et régulières avec les employeurs, les travailleurs et leurs organisations. Les conventions nos 81 et 129 invitent d'ailleurs l'autorité compétente à prendre des dispositions pour favoriser cette collaboration.

Les inspecteurs sont en premier lieu en contact avec les employeurs et les travailleurs de l'entreprise, soit lors de visites, soit lors de réunions d'organes tels que les comités de sécurité et d'hygiène ou les comités d'entreprise, soit lors de réunions de conciliation pour prévenir ou tenter de régler des conflits. Les inspecteurs ont également des contacts fréquents avec des travailleurs et des employeurs extérieurs à l'entreprise. Très souvent, ils donnent des conseils, des informations et des avis dans leurs bureaux. Parfois, ils président des commissions paritaires, par exemple pour négocier des conventions collectives ou régler des conflits. Ils peuvent également donner des cours sur des thèmes sociaux à des syndicalistes ou à des chefs d'entreprise.

L'inspection du travail et les travailleurs

Comme il est de la responsabilité claire et quotidienne des inspecteurs du travail d'assurer la protection des travailleurs, il est inévitable que les inspecteurs et les travailleurs aient des relations extrêmement étroites. Tout d'abord, le travailleur individuel peut s'adresser directement aux inspecteurs pour leur demander conseil ou les consulter sur une question. Cependant, les relations sont le plus souvent établies par l'intermédiaire d'organisations syndicales, de délégués syndicaux ou de représentants des travailleurs. Le but des syndicats étant de défendre et de représenter les travailleurs, leur rôle est généralement essentiel.

Cet ensemble de relations, dont la forme varie avec le pays et avec le problème en question, est discuté dans le chapitre Relations de travail et gestion des ressources humaines. Il convient de rappeler que les normes internationales – les conventions nos 81 et 129 et le protocole de 1995 à la convention no 81 – posent le principe de la collaboration, tant avec les employeurs qu'avec les travailleurs : l'autorité compétente doit « prendre les dispositions appropriées pour promouvoir ... la collaboration entre les agents de l'inspection du travail et les employeurs et les travailleurs ou leurs organisations ». Il convient également de noter que les relations entre l'inspection du travail, les employeurs et les travailleurs ne peuvent être séparées des relations de travail dans leur ensemble et sont nécessairement marquées par le fait que l'inspection du travail s'inscrit dans un système socio-économique différent d'un pays à l'autre .

Coopération

La collaboration peut s'établir de diverses manières, notamment par des relations directes ou par des organes de représentation ou de participation constitués au sein de l'entreprise. D'autres formes de collaboration sont pratiquées à l'échelle départementale ou régionale dans certains pays, selon diverses modalités.

Relations directes

L'une des fonctions fondamentales de l'inspection du travail, telle que décrite à l'article 3 de la convention n° 81 de l'OIT, est de fournir des informations et des conseils aux employeurs et aux travailleurs, qui peuvent demander aux inspecteurs leur avis sur des problèmes relevant de leur compétence et leur demander également de passer à l'action. Les travailleurs peuvent adresser une plainte ou une demande d'avis ou d'action (visite d'un lieu de travail, par exemple) à l'inspection par l'intermédiaire des syndicats ; bien que les inspecteurs du travail restent libres d'agir ou non et de choisir la forme de leur action, les travailleurs et leurs organisations disposent d'une certaine initiative en matière d'inspection.

Relations entre inspection du travail et représentation ou participation organes au sein de l'entreprise

C'est probablement la forme de collaboration la plus évidente et la plus régulière. En raison de leur expérience et de leur familiarité avec le travail, les travailleurs sont particulièrement bien placés pour détecter les problèmes survenant dans les conditions de travail, notamment en matière de sécurité et de santé, et proposer des solutions. Il est normal qu'ils soient consultés et associés à l'étude et à la solution des problèmes et aux décisions qui les concernent. Ces principes, qui appellent au dialogue et à la participation au sein de l'entreprise, appellent non moins naturellement un échange d'informations et une collaboration avec l'inspection du travail.

L'un des organes de participation les plus courants au sein de l'entreprise est le comité de sécurité et d'hygiène. Ce comité, qui comprend les représentants de l'employeur et des travailleurs, poursuit dans son domaine le travail de l'inspection du travail. Les représentants des travailleurs sont normalement les plus nombreux. Les animateurs du comité sont généralement les chefs d'entreprise ou leurs représentants, ce qui permet de s'assurer que les décisions prises par le comité seront suivies d'effets. Des experts techniques, dont des médecins du travail et des délégués à la sécurité, assistent si possible le comité. Pour ses réunions les plus importantes, le comité peut également faire appel à l'inspecteur du travail et à l'ingénieur des services de sécurité sociale. Le comité de sécurité et de santé peut et doit en effet effectuer des tournées et des visites très régulières sur les lieux de travail pour détecter les risques, attirer l'attention de la direction sur des problèmes de sécurité et de santé ou lui adresser des plaintes à ce sujet, proposer des améliorations, vérifier les mesures prises sur les décisions antérieures, mener des enquêtes en cas d'accident du travail et prendre l'initiative d'initier les travailleurs à la prévention élémentaire des risques professionnels et d'approfondir leurs connaissances et de sensibiliser l'ensemble du personnel de l'entreprise, du sommet de la hiérarchie au bas, participer à la lutte contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Dans de nombreux pays, les membres du comité de sécurité et d'hygiène ont le droit d'accompagner les inspecteurs du travail lors de leurs visites. L'expérience montre que, là où les comités de sécurité et d'hygiène fonctionnent bien, la collaboration avec l'inspection du travail est une pratique courante. D'autres instances représentatives, les comités ou comités d'entreprise, qui ont une compétence plus large, jouent le même rôle d'extension. De nombreux problèmes liés à l'application de la législation du travail peuvent ainsi être résolus : des solutions appropriées peuvent être trouvées qui vont au-delà de l'application à la lettre des textes, et ce n'est que dans les cas difficiles que l'inspecteur du travail est sollicité.

Dans de nombreux pays, la législation prévoit la nomination dans l'entreprise de délégués du personnel ou délégués syndicaux, qui s'occupent entre autres des conditions d'emploi et de travail et peuvent entretenir un dialogue avec l'employeur. Toutes sortes de problèmes peuvent être soulevés de cette manière qui, autrement, n'apparaîtraient pas au grand jour. Ces problèmes peuvent souvent être résolus sans l'aide de l'inspecteur du travail, qui n'intervient qu'en cas de difficultés. Dans certains pays, les représentants du personnel sont chargés de présenter à l'inspection les réclamations et observations relatives à l'application de la législation. Les inspecteurs ont souvent le droit et parfois l'obligation d'être accompagnés de représentants du personnel lors de leurs visites. Ailleurs, les représentants des travailleurs doivent être informés des visites des inspecteurs et parfois aussi de leurs observations ou constatations.

Une tâche très importante de l'inspection du travail est de maintenir des conditions telles que les organes représentatifs ou participatifs puissent fonctionner normalement. L'une est d'assurer le respect des droits syndicaux, la protection des représentants des travailleurs et le bon déroulement des travaux de ces organes, conformément aux dispositions légales. Les inspecteurs du travail ont un rôle très important à jouer pour s'assurer que les organes représentatifs et participatifs ont une existence réelle et mènent des activités utiles, et c'est l'un des principaux domaines dans lesquels ils peuvent donner des conseils.

Participation aux tâches d'inspection

Dans certains pays, la législation prévoit explicitement la participation des représentants des travailleurs – syndicats, délégués syndicaux ou représentants élus – aux fonctions d'inspection du travail dans certaines circonstances.

Consultation obligatoire des syndicats

En Italie, dans certains cas précisés par la loi, l'inspection du travail est tenue de demander l'avis des organisations syndicales avant d'adopter une disposition. Fréquemment aussi, lorsque le ministère du travail fournit des explications aux inspecteurs du travail sur l'interprétation et l'application des lois, ces explications sont également communiquées aux organisations syndicales par voie de circulaires, de briefings ou de réunions. Conformément aux instructions ministérielles, les visites des inspecteurs du travail doivent être précédées et suivies de réunions avec les syndicats, qui ont en outre le droit de prendre connaissance des procès-verbaux des visites. Cette dernière pratique est suivie dans de plus en plus de pays, souvent requise par la loi, et s'est avérée un outil des plus efficaces contre les comportements contraires à l'éthique ou la négligence de la part de certains inspecteurs.

En Norvège, la loi du 4 février 1977 sur la protection des travailleurs et le milieu de travail prévoit dans certaines de ses dispositions que les services d'inspection doivent permettre aux représentants des travailleurs d'exprimer leur avis avant que l'inspection ne prenne une décision.

Participation et intervention directe des représentants des travailleurs

La participation des partenaires sociaux à l'inspection a été renforcée dans divers pays, notamment dans les pays nordiques.

En Suède, la loi du 19 décembre 1977 sur le milieu de travail prévoit la création d'un comité de sécurité chargé de planifier et de superviser les activités de sécurité et la nomination d'un ou plusieurs délégués des travailleurs à la sécurité dotés de larges pouvoirs d'inspection et d'accès à l'information. Ils sont autorisés à ordonner la suspension du travail lorsqu'ils estiment qu'une situation est dangereuse, dans l'attente d'une décision de l'inspection du travail et malgré l'opposition de l'employeur. Aucune sanction ne peut être infligée à un délégué dont la décision de suspendre le travail n'est pas confirmée par l'inspecteur du travail, et l'employeur ne peut réclamer aucune indemnité pour la suspension au délégué ou à l'organisation syndicale.

Des dispositions similaires sur la nomination et les fonctions des délégués à la sécurité figurent dans la loi de 1977 de la Norvège. Cette loi prévoit également la création, dans toutes les entreprises occupant 50 personnes ou plus, d'une commission du milieu de travail, qui participe à la planification et à l'organisation de la sécurité et peut prendre des décisions ; le coordinateur de cette commission paritaire change chaque année, étant élu alternativement par les représentants des employeurs et des travailleurs, et émet un vote.

Au Danemark, l'organisation de l'inspection de sécurité, basée sur la coopération entre les travailleurs et l'employeur dans l'entreprise, a été clarifiée et renforcée, un rôle accru étant donné aux représentants syndicaux. Le principe de base qui sous-tend la loi du 23 décembre 1975 sur le milieu de travail est que la responsabilité d'assurer la sécurité du travail doit être décentralisée et, in fine, entièrement assumée par l'entreprise - et que la plupart des problèmes peuvent et doivent y être résolus, sans intervention extérieure .

Rôle des travailleurs dans l'inspection des conditions de travail et la Environnement de travail : tendances internationales

D'une manière générale, il semblerait que la participation des travailleurs à l'inspection des conditions de travail et du milieu de travail continuera d'augmenter, en particulier dans les pays qui ont introduit des «régimes d'auto-inspection» ou de contrôle interne, comme certains pays nordiques . De tels régimes dépendent d'organisations de travailleurs fortes et de leur participation active au processus d'audit sous-jacent au niveau de l'entreprise, qui est la pièce maîtresse de toute « auto-inspection ». C'est dans cette direction que s'orientent de nombreuses organisations syndicales. La volonté de ces organisations, quelle que soit leur orientation, de participer à l'examen et à l'application des mesures d'humanisation des conditions et de l'environnement de travail a été documentée dans de nombreuses rencontres internationales récentes.

En particulier, l'élection de délégués à la sécurité pour représenter les travailleurs de l'entreprise dans toutes les questions de sécurité et de protection de la santé est essentielle. Ces fonctionnaires devraient recevoir une formation appropriée aux frais de l'entreprise. Ils doivent disposer du temps nécessaire pour procéder aux inspections et avoir le droit d'arrêter tout travail qui leur paraît dangereux, sous réserve de vérification par les pouvoirs publics (en principe, l'inspection du travail).

La participation syndicale à la détermination des critères d'utilisation des substances et produits dangereux est un autre critère essentiel. Les représentants des travailleurs devraient avoir une influence réelle sur le processus de gestion concernant l'utilisation des substances dangereuses, le choix des matériaux, l'élaboration des méthodes de production et la protection de l'environnement. D'une manière générale, les syndicats et les représentants des travailleurs devraient avoir le droit de participer, tant à l'échelle nationale que sur le lieu de travail, à la protection de la santé et de la sécurité de leurs membres.

La convention de l'OIT sur la sécurité et la santé au travail, 1981 et la recommandation (nos 155 et 164 respectivement) montrent une tendance similaire. La convention stipule que la sécurité au travail, la santé au travail et le milieu de travail doivent faire l'objet d'une «politique nationale cohérente», formulée, mise en œuvre et révisée périodiquement «en consultation avec les organisations d'employeurs et de travailleurs les plus représentatives». Les deux instruments, qui énoncent les principes de cette politique et indiquent les mesures à prendre à l'échelle nationale et dans l'entreprise, appellent les Etats à assurer l'application des lois et règlements concernant la sécurité et la santé au travail et le milieu de travail en un système d'inspection approprié, pour fournir des conseils aux employeurs et aux travailleurs et imposer des sanctions en cas d'infractions.

Les dispositions qui intéressent le plus l'inspection du travail et les responsables syndicaux locaux sont celles qui concernent l'entreprise. La Convention contient les passages suivants :

(1) les travailleurs ... coopèrent à l'exécution par leur employeur des obligations qui lui incombent ;

(2) les représentants des travailleurs dans l'entreprise coopèrent avec l'employeur dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail ;

(3) les représentants des travailleurs dans une entreprise reçoivent des informations adéquates sur les mesures prises par l'employeur pour garantir la sécurité et la santé au travail et peuvent consulter leurs organisations représentatives au sujet de ces informations à condition qu'ils ne divulguent pas de secrets commerciaux ;

(4)les travailleurs et leurs représentants dans l'entreprise reçoivent une formation appropriée en matière de sécurité et de santé au travail;

(5) les travailleurs ou leurs représentants et, le cas échéant, leurs organisations représentatives dans une entreprise ... sont habilités à s'enquérir et sont consultés par l'employeur sur tous les aspects de la sécurité et de la santé au travail liés à leur travail ; à cet effet, des conseillers techniques peuvent, d'un commun accord, être amenés de l'extérieur de l'entreprise;

(6)un travailleur signale immédiatement ... toute situation dont il a des motifs raisonnables de croire qu'il présente un danger imminent et grave pour sa vie ou sa santé ; jusqu'à ce que l'employeur ait pris des mesures correctives, si nécessaire, l'employeur ne peut exiger que les travailleurs reprennent le travail. …

La recommandation (n° 164) qui accompagne la convention contient naturellement des dispositions beaucoup plus complètes et détaillées concernant toute la question des conditions de travail et du milieu de travail. Elle précise, entre autres, ce qui doit être mis à la disposition des représentants des travailleurs pour leur permettre d'accomplir leur mission : formation, information, consultation, temps pendant le temps de travail rémunéré, association aux décisions et aux négociations, accès à toutes les parties du lieu de travail, possibilité de communiquer avec les travailleurs et liberté de contacter les inspecteurs du travail et de recourir à des spécialistes. Les représentants devraient «être protégés contre le licenciement et d'autres mesures qui leur seraient préjudiciables dans l'exercice de leurs fonctions dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail».

L'ensemble des dispositions de la convention et de la recommandation, sur lesquelles les gouvernements et les partenaires sociaux sont parvenus à un accord général à l'échelle internationale, indique l'orientation générale non seulement de l'action syndicale au sein de l'entreprise en matière de conditions de travail et de l'environnement de travail mais aussi du travail de l'inspection du travail.

Il est clair que la coopération entre les chefs d'entreprises et les travailleurs ou leurs représentants se développera parallèlement au renforcement de la participation des travailleurs au contrôle de leurs conditions de travail. Le rôle de l'inspection du travail deviendra alors essentiellement un rôle consultatif dans un système auquel les partenaires sociaux participent activement. L'inspection du travail aura également pour mission de surveiller le bon fonctionnement des mécanismes de coopération au sein de l'entreprise, sans jamais abandonner sa fonction d'inspection dans les situations où des infractions appellent une inspection ou sur les lieux de travail - de moins en moins nombreux sans doute mais nombreux pendant un certain temps (en particulier les petites et moyennes entreprises) où une telle coopération n'est pas encore solidement établie. Le contrôle externe de l'inspection du travail restera indispensable, même dans les pays où le dialogue social est le plus avancé et la conscience des risques professionnels la plus aiguë. Elle restera le principal outil pour assurer plus efficacement la protection des travailleurs.

Les objectifs de l'inspection

De nombreuses formes et systèmes différents d'inspection du travail existent dans le monde. Au-delà de leurs différences, cependant, ils ont tous des objectifs de base communs qui déterminent les grandes fonctions de l'inspection. Quelles sont ces finalités ? La convention n° 81 de l'OIT, qui a acquis un statut quasi universel grâce à sa ratification par près de 120 États membres, les définit dans son article 3 comme suit :

Les fonctions du système d'inspection du travail seront:

(1) assurer l'application des dispositions légales relatives aux conditions de travail et à la protection des travailleurs pendant l'exercice de leur travail, telles que les dispositions relatives aux horaires, aux salaires, à la sécurité, à la santé et au bien-être, à l'emploi des enfants et des adolescents et autres matières connexes, dans la mesure où ces dispositions sont applicables par les inspecteurs du travail;

(2) fournir des informations techniques et des conseils aux employeurs et aux travailleurs concernant les moyens les plus efficaces de se conformer aux dispositions légales ;

(3) de porter à la connaissance de l'autorité compétente les défauts ou abus non spécifiquement couverts par les dispositions légales en vigueur.

La formulation est à la fois forte et souple et délimite un vaste champ d'action pour l'inspection du travail. L'obligation est faite à l'inspection du travail « d'assurer l'application des dispositions légales ». Ces termes ont été choisis avec soin par les auteurs de la convention, qui n'ont pas voulu parler simplement de «contrôler» ou de «promouvoir» l'application des dispositions légales, et ils énoncent clairement qu'il est du devoir des services d'inspection du travail d'en obtenir une application effective. .

Quelles sont ces dispositions ? Selon la convention, outre les lois et règlements, elles comprennent les sentences arbitrales et les conventions collectives auxquelles est conférée force de loi et qui sont exécutoires par les inspecteurs du travail. Ces dispositions constituent la base commune du travail de tous les inspecteurs d'un pays et la garantie pour les entreprises et les travailleurs contre ce qui est arbitraire, déloyal et injuste. Le rôle des inspecteurs du travail n'est pas de promouvoir leurs propres idées, aussi nobles soient-elles, mais de veiller à l'exécution de la législation en vigueur (c'est-à-dire d'être l'instrument fidèle et actif des autorités compétentes de leur pays - la législateurs — dans le domaine de la protection du travail).

La référence aux dispositions légales peut sembler restreindre le champ d'action des inspecteurs dans la mesure où ils ne sont pas habilités à faire appliquer toute amélioration des conditions de travail qui leur paraît souhaitable. En effet, l'une des fonctions de l'inspection du travail est « de porter à la connaissance de l'autorité compétente les manquements ou abus non spécifiquement couverts par les dispositions légales en vigueur ». Cette fonction se voit accorder la même priorité que la fonction d'application de la législation et fait de l'inspection du travail un instrument de développement social en lui accordant un droit d'initiative en matière de protection du travail.

Le champ d'application de l'inspection du travail varie d'un pays à l'autre, en fonction de l'étendue et de la nature de la législation en vigueur, des pouvoirs conférés aux inspecteurs par l'Etat et du domaine couvert par le système. Les pouvoirs des inspecteurs peuvent être généraux et porter sur toute législation relative aux conditions et au milieu de travail; elles peuvent en revanche être limitées à certaines matières, par exemple la sécurité et l'hygiène ou les salaires. Le système peut couvrir tous les secteurs de l'économie ou seulement certains d'entre eux ; il peut couvrir l'ensemble du territoire national ou seulement une partie de celui-ci. La convention n° 81 couvre toutes ces situations, de sorte que les missions des services nationaux d'inspection peuvent être très restreintes ou extrêmement larges selon les pays, tout en répondant à la définition internationale des finalités de l'inspection.

Parmi les normes internationales, celles concernant l'inspection du travail apparaissent comme indispensables à l'élaboration, l'application et l'amélioration de la législation du travail. L'inspection du travail est l'un des moteurs du progrès social, puisqu'elle veille à la mise en œuvre des mesures sociales établies (à condition bien sûr qu'elle en ait les moyens) et met en lumière les améliorations qui peuvent y être apportées.

Les fonctions d'inspection

On a vu que les objectifs de l'inspection du travail, tels que définis ci-dessus, se composent de trois tâches principales: l'application de la législation principalement par le contrôle, la fourniture d'informations et de conseils aux employeurs et aux travailleurs et la fourniture d'informations aux autorités compétentes. autorité.

Inspection

L'inspection repose essentiellement sur des visites des lieux de travail assujettis à l'inspection et elle vise, par l'observation et la discussion, d'abord à établir la situation, puis à favoriser (par des méthodes qui seront discutées ci-après) et à assurer effectivement l'application de la législation à des fins de prévention. .

L'inspection ne doit pas être orientée vers la répression systématique des manquements: son but est de faire appliquer la législation, pas d'attraper les contrevenants. Il est cependant essentiel que les inspecteurs puissent, le cas échéant, recourir à des mesures coercitives en établissant un procès-verbal en vue de l'application de sanctions suffisamment sévères pour être dissuasives. S'il n'y a pas de sanctions ou si les sanctions ne produisent pas le résultat escompté dans un délai raisonnable, les inspecteurs du travail perdent toute leur crédibilité, et leur travail perd toute son efficacité C'est notamment le cas lorsque l'inspection du travail doit saisir les tribunaux civils pour obtenir des avis d'amélioration et sanctions.

Il est évident que le but de l'inspection est la protection future des travailleurs en mettant fin à des situations dangereuses ou irrégulières. Dans le domaine de la sécurité et de la santé, l'inspection s'effectue en trois étapes. Avant la construction d'une usine, l'aménagement d'une usine ou la fabrication d'une machine, par exemple, il s'assure, dès la conception, de la conformité à la législation en vigueur. Cette vérification préliminaire sera suivie de l'inspection normale effectuée lors des visites sur les lieux de travail. Enfin, en cas d'accident, la surveillance prendra la forme d'une enquête destinée principalement à prévenir la répétition de l'accident.

L'inspection peut prendre diverses formes selon le système d'inspection adopté par le pays et son objectif précis. Dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail, l'inspection repose principalement sur des visites d'ateliers et d'autres lieux de travail. Dans celui de la durée du travail, des salaires et du travail des enfants, les inspecteurs doivent exiger les registres que l'entreprise est tenue de tenir et vérifier leur exactitude. Dans le domaine de la liberté syndicale, les inspecteurs doivent vérifier, conformément aux dispositions légales, que les élections prévues se déroulent correctement, que le syndicat peut exercer ses activités légales et qu'il n'y a pas de discrimination à l'encontre de ses membres.

Dans leur travail d'inspection, les inspecteurs peuvent faire appel à certaines sources d'assistance (voir section précédente sur la collaboration), soit pour mieux comprendre la situation (organismes de contrôle, experts désignés, services de prévention des accidents des caisses de sécurité sociale, organismes relevant de la entreprise comme le comité de sécurité et d'hygiène), ou d'étendre leur propre action (représentants du personnel, services de prévention précités, organisations d'employeurs et de travailleurs). L'action des inspecteurs est discontinue et il faut trouver quelque chose de permanent dans l'entreprise pour la poursuivre.

Informations et conseils pour les employeurs et les travailleurs

La fonction d'information et de conseil aux employeurs et aux travailleurs a un objectif clair, selon les termes de la convention no 81: indiquer «les moyens les plus efficaces de se conformer aux dispositions légales». Comme la fonction d'inspection, il contribue à assurer l'application de la législation. L'information et le conseil complètent l'inspection puisque, comme indiqué plus haut, la mission de l'inspecteur du travail n'est pas uniquement coercitive.

Ainsi, les effets des actes nécessairement brefs des inspecteurs peuvent perdurer sur le lieu de travail. Les conseils et informations fournis par les inspecteurs sont donc tournés vers l'avenir. Les inspecteurs ne peuvent se limiter à une sorte de contrôle rétrospectif pour s'assurer que tout est en ordre : ils doivent donner des conseils sur les mesures à prendre pour assurer la protection du travail, expliquer les exigences légales concernant le paiement des salaires, indiquer où et comment les examens médicaux peuvent être effectués, pour démontrer l'importance de limiter les heures de travail et pour discuter des problèmes existants ou potentiels avec l'employeur. Selon l'opinion autorisée, les inspecteurs qui obtiennent les meilleurs résultats sont ceux qui consacrent le plus d'efforts à un travail d'éducation sur le lieu de travail auprès de la direction ou de son agent et de la représentation des travailleurs. C'est une pratique courante dans des pays comme la République fédérale d'Allemagne, le Royaume-Uni, les pays scandinaves et bien d'autres.

Du fait de sa nature éducative, la fonction d'information et de conseil peut exercer une influence au-delà du cas considéré et jouer un rôle de prévention : ses effets peuvent se faire sentir sur d'autres cas, similaires, voire différents, et entraîner des améliorations allant plus loin que les exigences légales.

Informations et conseils lors des visites sur les lieux de travail

Il est presque inévitable, comme on l'a noté plus d'une fois ci-dessus, que la fonction d'inspection, qui s'exerce principalement lors de visites sur les lieux de travail, implique la fourniture d'informations et de conseils. Les inspecteurs du travail sont tenus de répondre à toutes les questions que les employeurs, leurs assistants ou les représentants des travailleurs pourraient poser. Il est tout aussi naturel pour eux de donner des avis et des explications. En effet, l'information et le conseil sont tellement liés à la fonction d'inspection qu'il est difficile de distinguer l'un de l'autre. Cependant, le juste équilibre entre l'intervention consultative et l'intervention de surveillance fait l'objet d'un débat national et international considérable. En règle générale, il s'agit du point central de tout énoncé de politique national complet et cohérent en matière d'application de la loi.

Informations et conseils dans les bureaux de l'inspection du travail

Les inspecteurs du travail doivent être facilement accessibles et les portes de leurs bureaux doivent être grandes ouvertes à toute personne désireuse de les consulter, de leur soumettre un problème ou de leur adresser des plaintes concernant des situations données. Leur attitude doit toujours être guidée par le même souci : promouvoir un respect intelligent et plus complet des dispositions légales.

Un lien doit être fait entre ces activités et le traitement des litiges individuels. Celles-ci concernent en règle générale l'application des lois ou règlements et, dans certains pays, occupent une grande partie du temps du personnel d'inspection, y compris celui des inspecteurs. Le problème posé par les activités de ce type a été réglé par les conventions nos 81 et 129, qui ne les tolèrent que si elles n'entravent pas l'exercice effectif des fonctions premières des inspecteurs ou ne portent pas atteinte à leur autorité ou à leur impartialité. Un certain nombre de pays considèrent qu'il s'agit d'une question d'effectifs suffisants et que l'organisation doit être suffisamment importante pour permettre aux inspecteurs de s'acquitter également correctement de leurs autres tâches.

Activités éducatives

Informer et conseiller sont des tâches de nature éducative, dans la mesure où les informations et conseils donnés ont vocation non seulement à être suivis à la lettre dans une situation donnée mais aussi à être compris et assimilés, à convaincre et, en somme, , pour avoir un effet large et durable. L'information et le conseil peuvent également prendre la forme de cours, de conférences ou d'exposés, comme le suggère d'ailleurs la recommandation n° 81. Ces activités permettent évidemment de toucher un large public, d'expliquer à la fois la lettre et l'esprit de législation du travail et de faire en sorte qu'elle soit mieux comprise, mieux acceptée et donc mieux appliquée. Par exemple, en Norvège, il existe un comité national de formation composé de représentants de l'inspection du travail et des employeurs et travailleurs.

Dissémination d'information

L'ignorance de la législation sociale et la non-reconnaissance de sa finalité profonde et de son utilité figurent parmi les principaux obstacles auxquels se heurte l'inspection du travail, en particulier dans les pays en développement. Inutile de souligner la grande utilité de toute mesure contribuant à favoriser la diffusion de l'information sur la législation du travail. Rien ne doit être négligé dans ce domaine, où les organisations d'employeurs et de travailleurs peuvent également jouer un rôle important. On peut citer ici le travail des services d'information du Health and Safety Executive du Royaume-Uni, qui collectent et diffusent un grand nombre d'informations (une bibliothèque, un service de documentation et de traduction sont disponibles ; des émissions de radio et de télévision sont préparées, des expositions organisées , etc).

Informer l'autorité compétente

Cette fonction est souvent sous-estimée ou négligée. Il est pourtant explicitement mentionné par les conventions n° 81 et 129 de l'OIT : l'inspection du travail a l'obligation « de porter à la connaissance de l'autorité compétente les défauts ou abus non spécifiquement couverts par les dispositions légales en vigueur ». Cette obligation imposée à l'ensemble de l'inspection du travail, des inspecteurs les plus subalternes jusqu'à leurs supérieurs hiérarchiques, complète le mandat qui fait de l'inspection du travail un agent actif de progrès social. La connaissance qu'ont les inspecteurs des problèmes du travail et de la situation des travailleurs, notamment en ce qui concerne la protection garantie aux travailleurs par les lois et règlements sociaux, les met en mesure d'informer les autorités.

Autres fonctions

Dans de nombreux pays, les services d'inspection du travail sont chargés d'autres tâches. Les conventions nos 81 et 129 admettent cette situation mais précisent que «toute autre tâche qui peut être confiée aux inspecteurs du travail ne doit pas être de nature à entraver l'exercice efficace de leurs fonctions principales ou à porter atteinte... à l'autorité et à l'impartialité qui sont nécessaires aux inspecteurs dans leurs relations avec les employeurs et les travailleurs ».

Le domaine économique

Les questions économiques et sociales sont souvent étroitement liées. De par les contacts qu'il entretient avec le monde du travail et les informations qu'il recueille dans le cadre normal de son travail, l'inspection du travail dispose d'un grand nombre d'informations à caractère social (sécurité et santé au travail, situation des travailleuses et jeunes travailleurs, état des relations de travail, conclusion et signature de conventions collectives) ou de nature économique (nombre d'entreprises, effectif numérique du personnel, heures de travail effectuées, salaires moyens versés dans les différents secteurs d'activité, besoins en main-d'œuvre qualifiée dans les différents secteurs économiques ou régions géographiques, etc.).

Il n'est pas surprenant que les autorités de nombreux pays aient envisagé d'utiliser une source d'information aussi précieuse, notamment pour élaborer des plans de développement. L'inspection du travail, par sa nature objective et sérieuse, peut certainement fournir ces informations et contribuer ainsi à l'administration et au développement du pays.

Relations de travail : conciliation et arbitrage

Les conventions internationales ne prévoient pas que la conciliation ou l'arbitrage soient confiés aux services de l'inspection du travail. La recommandation (n° 1947) sur l'inspection du travail, 81, les exclut cependant explicitement car, en les exécutant, les inspecteurs du travail mettent en péril leur indépendance et leur impartialité. La conciliation et l'arbitrage ne sont donc pas traités ici. Or, dans de nombreux pays, ces fonctions, notamment la conciliation, sont en fait confiées aux services de l'inspection du travail. Depuis l'adoption de la recommandation n° 81 en 1947, cette question a toujours donné lieu à discussion. La recommandation (n° 1969) sur l'inspection du travail (agriculture), 133, est d'ailleurs moins précise que la recommandation n° 81, car elle accepte la participation des inspecteurs du travail au règlement des conflits du travail, à titre temporaire, lorsqu'aucun organe spécial n'existe. existent aux fins de la conciliation.

Protection des représentants des travailleurs

La convention (no 1971) des représentants des travailleurs, 135, qui est complétée par la recommandation no 143 de la même année, prévoit que

Les représentants des travailleurs dans l'entreprise doivent bénéficier d'une protection effective contre tout acte leur portant préjudice, y compris le licenciement, fondé sur leur qualité ou leurs activités en tant que représentants des travailleurs ou sur leur affiliation syndicale ou leur participation à des activités syndicales, pour autant qu'ils agissent conformément aux lois ou conventions collectives en vigueur ou autres arrangements convenus conjointement.

Certains pays exigent que les employeurs obtiennent un accord syndical ou une autorisation judiciaire avant de pouvoir licencier un représentant des travailleurs. Dans les autres pays, dont la France et les pays de tradition administrative française, le licenciement des délégués syndicaux ou des représentants élus du personnel est soumis à l'autorisation de l'inspection du travail (sauf accord du comité d'entreprise, fait bien entendu rarissime) . Dans leurs décisions, les inspecteurs du travail doivent s'efforcer d'établir si les fautes imputées par les employeurs aux représentants des travailleurs sont ou non liées à leurs activités syndicales, telles que définies par la loi et la jurisprudence. Si tel est le cas, ils rejetteront le licenciement ; sinon, ils l'autoriseront (sous réserve, bien entendu, que les charges retenues contre les personnes concernées soient suffisamment graves).

Supervision dans le domaine de l'emploi

Dans de nombreux pays, notamment ceux qui suivent le système administratif français, les services d'inspection du travail jouent un rôle important dans le domaine de l'emploi, notamment dans le contrôle des licenciements. En France, en cas de demande de licenciement collectif, les agents de l'inspection du travail ont pour mission de vérifier le déroulement de la procédure de consultation, le bien-fondé des motifs invoqués pour justifier les licenciements et l'étendue des mesures prises pour être prises pour la réinstallation et l'indemnisation. Après examen de la situation financière de l'entreprise ou du marché de l'emploi, l'inspecteur du travail peut en théorie refuser les licenciements (en fait, cela ne semble se produire que dans environ 5% des cas).

Toujours dans le domaine de l'emploi, les inspecteurs du travail sont souvent mandatés pour veiller au respect du principe de non-discrimination lors de l'embauche ou du licenciement (interdiction de toute discrimination fondée notamment sur la race, le sexe, la religion, l'opinion politique, la nationalité et la situation familiale ). Ils contrôlent les activités des agences d'intérim pour prévenir les effets négatifs que le développement des formes d'emploi précaires, notamment l'intérim, peut avoir sur les salariés. Les problèmes économiques et le chômage qui sévissent dans de nombreux pays conduisent à une surveillance accrue concernant la lutte contre le travail clandestin et la réglementation du travail étranger ou des heures supplémentaires, par exemple.

Fonctions diverses

L'inspection du travail peut être chargée d'autres tâches que celles mentionnées ci-dessus, telles que la surveillance de la protection de l'environnement contre la pollution des entreprises ou la prévention des incendies dans les locaux recevant du public. Ces fonctions, que parfois seul l'inspection du travail est en mesure de remplir, ne relèvent pas directement de sa compétence et ne doivent pas interférer avec ses fonctions principales de protection des travailleurs dans l'entreprise.

Les différents systèmes d'inspection

Les services d'inspection du travail diffèrent d'un pays à l'autre, mais il est possible de distinguer deux systèmes principaux : ceux qui couvrent tous les secteurs d'activité et ceux qui ont des départements spécialisés pour chaque secteur (mines, agriculture, fabrication, transport, etc.). L'objectif de l'inspection peut également varier selon le service d'inspection : sécurité et santé, conditions de travail, salaires et relations de travail. De même, une distinction peut être faite entre les systèmes dont les agents appliquent les dispositions réglementaires dans tous les domaines couverts et ceux qui ont des sections spécialisées en fonction de l'objet de l'inspection. Dans certains pays, certaines tâches d'inspection sont confiées aux collectivités locales, et les pays ayant une industrie minière ont généralement un système spécial pour ce secteur.

Structure des systèmes

Compétence par rapport au secteur d'activité

Dans certains pays, il existe un système unique d'inspection du travail compétent pour tous les secteurs d'activité économique. Si l'on fait abstraction des mines, qui relèvent dans presque tous les pays du ministère correspondant (il y a des exceptions : le Mexique par exemple), on retrouve ce système dans des pays européens comme le Luxembourg, l'Espagne ou la Suisse. On le trouve également dans de nombreux pays d'Afrique et d'Asie. Les pays d'Afrique francophone, par exemple, ont des systèmes d'inspection qui relèvent du ministère du travail et couvrent toutes les branches d'activité.

L'avantage de ce système est qu'il donne à l'inspection et, au-dessus d'elle, au ministère du travail une vue d'ensemble des différents secteurs, les problèmes de protection des salariés étant souvent similaires. De plus, dans les pays à ressources limitées, ce système permet de réduire le nombre de visites nécessaires pour superviser différentes activités. Dans d'autres pays, un service d'inspection spécialisé existe pour chaque secteur d'activité, relevant du ministère concerné.

A la fin du XIXe siècle, la plupart des pays européens disposaient d'un organe chargé des questions de législation du travail, généralement rattaché à un ministère, tel que le ministère de l'intérieur ou le ministère de l'industrie et du commerce. Dans les années qui ont précédé la Première Guerre mondiale, des ministères autonomes du travail ont été créés avec pour tâche de faire appliquer la législation du travail par l'intermédiaire d'une administration publique spécialisée. C'est pourquoi, dans certaines branches d'activité, le contrôle du respect des lois protégeant les travailleurs est resté parmi les attributions du département ministériel auparavant compétent.

Entre ces deux extrêmes - un système d'inspection unique relevant d'un ministère compétent pour tous les secteurs d'activité et de nombreux services sectoriels spécialisés relevant de plusieurs ministères -, il existe des systèmes intermédiaires dans lesquels un service d'inspection ne s'occupe que de quelques secteurs ou de plusieurs services d'inspection relèvent d'un seul et même ministère.

Depuis plusieurs années, une tendance se développe vers le regroupement des services d'inspection sous le contrôle d'une seule autorité, généralement le ministère du travail, à la fois parce que les problèmes qui se posent dans la plupart des secteurs sont très similaires sinon identiques et parce que cela rend plus administration efficace et plus économique. Un système unifié et intégré augmente les possibilités ouvertes au gouvernement en matière de prévention des risques professionnels et de protection juridique des travailleurs.

En 1975, la France a unifié les principaux services d'inspection, l'ensemble de l'organisme interministériel ainsi constitué étant régi par des conditions de service identiques, relevant du ministère du Travail. En 1975, le Royaume-Uni a également décidé de regrouper ses services d'inspection de la santé et de la sécurité (il y avait sept services distincts relevant de cinq ministères différents) sous le Health and Safety Executive. Avec la création de cet Exécutif, l'Inspection du Travail, les autres services d'inspection (et successivement même ceux de l'exploitation pétrolière et gazière offshore et des transports publics), le Service Médical de l'Emploi et d'autres organismes officiels exerçant un travail de prévention sont devenus partie intégrante d'une seule institution relevant d'un seul ministère, la Direction de l'Emploi. (Cependant, ce Département a été dissous en 1995 et l'inspection du travail relève désormais du Département de l'Environnement, une tendance que l'on observe également dans d'autres pays, par exemple en Allemagne.) Le souci de coordonner les efforts de prévention et d'amélioration des conditions de travail face à une législation de plus en plus compliquée a également conduit d'autres pays à confier le contrôle de l'application des lois sur la protection du travail à un seul corps d'inspection, relevant généralement du ministère du travail.

Compétence quant à l'objet de l'inspection

Les services de l'inspection du travail sont chargés de veiller au respect des dispositions légales dans de nombreux domaines : santé et sécurité, conditions de travail, salaires et relations de travail.

Dans certains pays, par exemple la Belgique, l'Italie et le Royaume-Uni, le système d'inspection comprend des services spécialisés en fonction de l'objet de l'inspection. En Belgique, il existe les services suivants : une inspection technique pour la prévention et la sécurité dans l'entreprise ; une inspection médicale, chargée de la santé et de l'hygiène; une inspection chargée de la législation sociale, traitant des conditions d'emploi (salaires, durée du travail, etc.); une inspection pour contrôler le paiement des cotisations sociales; et les fonctionnaires s'occupant des questions de relations de travail. Dans les systèmes de ce type, bien que les différents services soient spécialisés dans des domaines particuliers, ils sont généralement compétents pour tous les secteurs économiques.

La spécialisation des inspecteurs du travail est une tentative de répondre à la complexité croissante des tâches d'inspection. Les partisans de la spécialisation soutiennent qu'un inspecteur ne peut pas posséder suffisamment de connaissances pour traiter de tous les problèmes de protection des travailleurs. La spécialisation est telle dans certains pays que les conditions de travail, au sens large du terme, peuvent relever de quatre ou cinq types d'inspection dans une même entreprise.

D'autres pays, cependant, ont un système unique selon lequel les fonctionnaires sont compétents pour toutes les questions relatives à l'inspection du travail. C'est la situation en Autriche, en Allemagne et dans les pays francophones d'Afrique, par exemple ; ces derniers, pour des raisons évidentes, ne se sont pas lancés dans l'organisation coûteuse de plusieurs organismes spécialisés et n'ont donc eu qu'une seule inspection auprès du ministère du travail. Dans de tels cas, l'inspection est responsable de toutes les tâches qui doivent être effectuées dans l'entreprise, l'inspecteur ou le superviseur étant le seul représentant du ministère à s'en occuper.

Ce système a l'avantage de donner aux inspecteurs une vision globale des problèmes du travail, souvent interdépendants, et d'éviter une multiplication des inspections et un manque de coordination; mais on peut se demander jusqu'à quel point les inspecteurs peuvent mener à bien un programme aussi étendu compte tenu de la complexité croissante des problèmes juridiques et techniques.

Il existe une solution intermédiaire consistant en un système dans lequel les inspecteurs du travail sont compétents dans de nombreux domaines mais disposent de connaissances techniques suffisantes pour reconnaître les situations de danger et faire appel à des spécialistes en médecine, ingénierie et chimie, comme le prévoit la convention n° 81. C'est la situation en France. Un autre exemple est fourni par le Royaume-Uni, où les inspecteurs généraux dans le domaine de la sécurité et de la santé font appel à des inspecteurs spécialisés dans des branches très techniques (électricité, chimie, énergie atomique) lorsque des problèmes particuliers se posent. L'inspection du travail a alors tendance à devenir pluridisciplinaire ; au Danemark et dans d'autres pays nordiques, ainsi qu'aux Pays-Bas, elle est même devenue pluridisciplinaire, avec des équipes d'inspection de district composées d'inspecteurs (ayant reçu une formation technique), d'ingénieurs, de médecins, de psychologues, de juristes et d'ergonomes. La mise en place d'équipes multidisciplinaires permet aux coordonnatrices d'avoir une vision globale des différents aspects des conditions de travail et de baser leurs décisions sur une synthèse des avis exprimés. Le coût d'une telle organisation est élevé, mais elle est très efficace, à condition que le travail des différents spécialistes soit bien coordonné.

Le rapprochement des services d'inspection établis dans un certain nombre de pays, ou du moins la coordination plus étroite de leurs activités, peut s'expliquer par les relations étroites entre les différents aspects des conditions de travail. De telles mesures répondent aux souhaits tant des responsables de l'encadrement que des travailleurs et des syndicats. Les travailleurs aux prises avec des difficultés ne voient pas pourquoi ils devraient entrer en contact avec plusieurs fonctionnaires, chacun compétent pour traiter un aspect différent du problème, et expliquer leur situation à plusieurs reprises, peut-être avec une grande perte de temps de travail. Le souci des syndicats est d'améliorer l'efficacité de l'inspection du travail et de faciliter les contacts entre celle-ci et leurs membres.

Fonctions des collectivités locales

Quelques Etats font encore appel aux collectivités locales soit pour aider les services d'inspection du travail dans l'accomplissement de leurs missions, soit même pour exercer des fonctions d'inspection à la place des services de l'Etat.

Par exemple, en Suède, la loi du 19 décembre 1977 sur le milieu de travail a confié l'application de ses dispositions et des règlements pris en application de celle-ci au Conseil de la protection des travailleurs et au service de l'inspection du travail, sous le contrôle et la direction de ce conseil. La loi invite chaque commune, en concertation avec l'inspection du travail, à désigner un ou plusieurs agents de contrôle pour assister le service d'inspection dans l'accomplissement de sa mission, généralement par le contrôle des entreprises occupant moins de dix personnes et n'utilisant pas de machines. Toutes les communes doivent remettre un rapport annuel au service d'inspection sur la manière dont ce contrôle a été exercé.

En Italie notamment, la loi du 23 décembre 1978 portant réforme du système de santé a décentralisé la responsabilité de la santé publique, y compris l'hygiène et la sécurité au travail, vers les autorités sanitaires régionales et locales. Les unités locales de santé, désignées par les autorités communales, s'occupent de tout ce qui concerne la santé publique : administration hospitalière, organisation des services locaux de santé, hygiène et sécurité dans les entreprises, etc. Cette réforme retire ainsi à l'inspection du travail, service de l'Etat relevant du ministère du Travail, la fonction pour laquelle il avait été créé à l'origine.

Le transfert des fonctions autrefois assumées par l'inspection du travail en matière de sécurité et d'hygiène vers les unités locales de santé s'est traduit par la création de deux services d'inspection du travail : l'un relevant du ministère du Travail, qui continue de contrôler l'application des lois sociales et réglementation (salaires, horaires de travail, congés payés, etc.) et pour effectuer quelques tâches liées à la sécurité et à la santé (vérification des rayonnements ionisants, surveillance des chemins de fer en collaboration avec les agents des chemins de fer, etc.) et une autre compétente pour traite de la plupart des questions de sécurité et de santé, qui fait partie intégrante du Service national de santé et s'appuie sur des organes municipaux, à savoir les unités locales de santé.

En Ouganda, une importante campagne de décentralisation a également placé l'inspection du travail, mais pas l'inspection des fabriques, sous la responsabilité directe des autorités locales (du district). Ces quelques exemples sont cependant des exceptions et ne constituent pas la règle. Ils soulèvent également de sérieux doutes quant à la compatibilité avec les normes importantes des conventions pertinentes de l'OIT (notamment la convention n° 81, article 4), qui stipulent que l'inspection du travail doit être placée sous l'autorité d'une autorité centrale.

Inspection du travail dans les mines

Presque tous les pays dotés d'une industrie minière disposent d'un système d'inspection de ce secteur inspiré du système en vigueur depuis plusieurs générations dans les anciens pays miniers d'Europe : Belgique, France, République fédérale d'Allemagne et Royaume-Uni.

Les systèmes existants ont en commun deux caractéristiques majeures. Si le contrôle des conditions de travail à la surface reste du ressort de l'inspection du travail, l'inspection de la sécurité et de la santé au fond, sauf dans quelques pays (par exemple le Mexique), relève des ingénieurs des mines, qui forment un corps spécialisé . Par ailleurs, tous ces systèmes associent, plus ou moins étroitement et avec des pouvoirs variés, des délégués mineurs à l'inspection du travail sur les chantiers.

Pouvoirs et devoirs des inspecteurs du travail

Powers

Droit d'entrée libre et d'enquête

Le premier pouvoir de l'inspecteur — sans lequel il y aurait évidemment peu d'inspection — est celui de visiter les entreprises. Les dispositions de la convention n° 81 (reprise dans la convention n° 129, qui s'applique à l'agriculture) concernant cette compétence sont les suivantes :

Les inspecteurs du travail munis des accréditations appropriées doivent être habilités :

(1) d'entrer librement et sans préavis à toute heure du jour ou de la nuit dans tout lieu de travail soumis à inspection ;

(2) d'entrer de jour dans tous les locaux qu'ils peuvent avoir un motif raisonnable de croire assujettis à l'inspection.

Lors de la rédaction des normes internationales, il y a eu beaucoup d'opposition à l'institution du droit d'accès aux lieux de travail. Les obstacles n'ont pas non plus manqué à l'incorporation de ce droit dans les législations nationales. En particulier, il a été avancé qu'il s'agissait d'une violation inacceptable du droit de propriété. La possibilité d'entrer à tout moment dans les établissements a fait l'objet de résistances particulières, mais il est bien évident que les inspecteurs ne peuvent établir l'emploi illégal de travailleurs, là où il existe, qu'en procédant à des contrôles à des heures inhabituelles. En pratique, le droit d'entrée est normal dans tous les pays disposant de services d'inspection.

Cette question (ainsi que d'autres liées aux pouvoirs d'inspection) a de nouveau fait l'objet d'intenses débats à la session de 1995 de la Conférence internationale du Travail, qui a traité de la question de l'inspection du travail dans le secteur des services non commerciaux. La Conférence a adopté un «Protocole pour étendre la convention no 81» à ce secteur, et a essentiellement réaffirmé les pouvoirs fondamentaux des inspecteurs, tout en permettant certaines exceptions et restrictions, par exemple pour des raisons de sécurité nationale ou à la lumière d'exigences opérationnelles spécifiques, pour lieux de travail sous l'autorité des forces armées, des services de police, des services pénitentiaires, des pompiers et autres services de secours, etc. (voir les articles 2 à 4 du Protocole de 1995 dans OIT 1996).

Aux termes des conventions nos 81 et 129, les inspecteurs doivent être autorisés «à procéder à tout examen, test ou enquête qu'ils jugent nécessaires pour s'assurer de la stricte observation des dispositions légales», ce qui implique, selon les termes de la deux instruments, le droit d'interroger, seul ou devant témoins, l'employeur ou le personnel, le droit d'exiger la production de tous livres, registres ou autres documents dont la tenue est prescrite par la législation nationale, et la droit de prélever des échantillons à des fins d'analyse. Ces droits sont généralement reconnus, bien que dans certains pays des restrictions puissent être imposées à la consultation des documents financiers.

Il semble donc qu'à de rares exceptions près, les pouvoirs de contrôle des inspecteurs soient acceptés et ne rencontrent plus d'opposition plate. La possibilité de faire appel à la police, prévue dans la plupart des lois, est sans doute un moyen de dissuasion suffisant, à condition qu'une procédure efficace ait été établie à cet effet entre les différents ministères concernés.

Ces pouvoirs, bien sûr, sont soumis aux mêmes limitations que les autres. S'ils sont exercés sans discernement, ils pourraient finalement produire un résultat opposé à celui souhaité. Ces droits sont accordés aux inspecteurs afin qu'ils puissent les exercer intelligemment et, comme l'expérience l'a montré, leur capacité à le faire dépend largement de la qualité de leur formation.

Pouvoirs d'injonction

La convention n° 81 stipule que « les inspecteurs du travail doivent être habilités à prendre des mesures en vue de remédier aux défauts constatés dans les installations, l'aménagement ou les méthodes de travail dont ils peuvent avoir des motifs raisonnables de croire qu'ils constituent une menace pour la santé ou la sécurité des travailleurs ». Cette disposition est reprise presque dans les mêmes termes dans la convention n° 129, qui couvre également l'utilisation de substances dangereuses, en raison, sans doute, de l'utilisation de plus en plus répandue des produits chimiques dans l'agriculture.

Si l'inspection du travail était dépourvue des moyens de remédier aux situations irrégulières constatées dans les entreprises, son efficacité serait évidemment limitée. C'est en grande partie à l'étendue réelle de ces pouvoirs, à la manière dont ils sont exercés et aux conséquences des avertissements et injonctions que l'on peut mesurer l'efficacité des services d'inspection.

Si les deux Conventions ainsi que le Protocole soulignent l'importance de principe des pouvoirs d'injonction, ils laissent tous deux une certaine latitude aux gouvernements. Après avoir prévu que les inspecteurs "seront habilités à donner ou à faire prendre des ordonnances" exigeant que les mesures nécessaires soient prises, que des modifications soient effectuées dans un délai déterminé ou des mesures avec force exécutoire immédiate, procédure n'est pas compatible avec la pratique administrative ou judiciaire de l'Etat, les inspecteurs peuvent « saisir l'autorité compétente pour l'émission d'arrêtés ou pour l'engagement de mesures avec force exécutoire immédiate ». Il faut tenir compte de l'impossibilité, en vertu des constitutions de certains Etats, de confier de tels pouvoirs à une autorité administrative. Les pouvoirs des inspecteurs ont donc tendance à varier d'un pays à l'autre, même dans les États qui ont ratifié la convention n° 81 de l'OIT.

En vue de « remédier aux défauts constatés », l'inspecteur peut soit rédiger un arrêté accordant à l'employeur un délai déterminé pour remédier à la situation, soit exiger que des mesures immédiates soient prises en cas de danger imminent. Ce dernier pouvoir est à la disposition des inspecteurs dans de plus en plus de pays : on peut citer la Belgique, la République fédérale d'Allemagne, le Japon, le Royaume-Uni, les pays scandinaves, l'Afrique du Sud et bien d'autres qui ont réformé leur législation en matière de sécurité et de santé au travail dans les années 1980 et au début des années 1990. Dans d'autres pays, ces mesures peuvent encore devoir être ordonnées par les tribunaux; mais le temps qu'il faut au tribunal pour rendre sa décision et pour que cette décision soit exécutée entraîne un délai pendant lequel un accident peut se produire. En outre, les juges des tribunaux civils ne sont souvent pas spécialement formés aux questions de protection du travail et se révèlent souvent insensibles aux violations; les amendes ont tendance à être faibles ; et ces facteurs et de nombreux autres qui tendent à saper l'autorité des inspections ont renforcé la tendance à délaisser les poursuites judiciaires pour des infractions même mineures, y compris les poursuites pénales, au profit de procédures administratives sur lesquelles les inspections exercent un contrôle plus efficace. Pour réduire ce délai, certains pays ont institué une procédure d'urgence qui permet à l'inspecteur de demander à tout moment au président du tribunal, même à domicile, une ordonnance à force exécutoire immédiate.

Droit d'appel

Il est évident que les décisions impératives prises par l'inspecteur sont généralement soumises à un droit de recours par l'employeur, car il convient de prévoir la prévention ou la rectification de tous les abus possibles. Les recours, en règle générale, sont suspensifs pour les ordonnances à durée limitée, mais non suspensifs pour les ordonnances à force exécutoire immédiate, compte tenu du danger imminent qu'elles visent.

Mesures prises en cas d'infraction

« Les personnes qui enfreignent ou négligent d'observer les dispositions légales dont l'application est assurée par les inspecteurs du travail s'exposent à des poursuites judiciaires immédiates sans sommation préalable. Ce principe strict énoncé dans la convention n° 81 et repris dans la convention n° 129 est néanmoins tempéré de deux manières. Premièrement, « des exceptions peuvent être prévues par la législation nationale en ce qui concerne les cas dans lesquels un avis préalable d'exécution de mesures correctives ou préventives doit être donné ». Deuxièmement, «il est laissé à la discrétion des inspecteurs du travail de donner des avertissements et des conseils au lieu d'engager ou de recommander des poursuites».

La seconde de ces dispositions donne aux inspecteurs une entière liberté de choix. Dans chaque cas, ils doivent déterminer quel moyen – avis, avertissement ou poursuites judiciaires – assurera le mieux le respect de la loi. Le choix doit s'inscrire dans un plan qu'ils ont spécialement adapté à la nature de l'entreprise et dans une séquence d'objectifs classés par ordre d'importance.

Si les inspecteurs décident de poursuites judiciaires, ils peuvent soit saisir eux-mêmes les tribunaux (comme dans les pays de tradition administrative britannique), soit recommander des poursuites judiciaires au ministère public ou à la justice (c'est la situation la plus courante). Les inspecteurs du travail rédigent alors des procès-verbaux, qui sont tenus pour authentiques selon les pays, soit jusqu'à ce qu'ils soient démentis, soit jusqu'à ce que leur authenticité soit contestée devant les tribunaux.

Les conventions nos 81 et 129 stipulent que « des sanctions adéquates en cas de violation des dispositions légales… doivent être prévues par la législation nationale et effectivement appliquées ». Alors que toutes les législations nationales prévoient des sanctions en cas d'infraction, trop souvent, celles-ci ne sont pas « adéquates ». Les amendes, dont le montant est souvent fixé lors de l'adoption des dispositions légales correspondantes et restent inchangées pendant des années, sont si légères qu'elles n'ont guère de valeur dissuasive. Si le tribunal prononce l'emprisonnement, c'est généralement par une peine avec sursis, mais la peine peut être exécutée en cas de récidive. Les tribunaux ont toujours un pouvoir discrétionnaire total. Ici, il faut bien reconnaître que la volonté d'un gouvernement de faire respecter les lois et règlements protégeant les travailleurs se juge à l'aune du poids des peines prescrites et de la manière dont elles sont appliquées par les tribunaux.

L'opposition à l'exercice des missions de l'inspection du travail ou la contestation de l'autorité de l'Etat sont généralement sévèrement punies par la législation nationale, qui doit en outre prévoir la possibilité de faire appel à la police. En effet, il est rare que les chefs d'entreprise pratiquent des tactiques d'obstruction.

Obligations

Impartialité

Aux termes des conventions nos 81 et 129, il est interdit aux inspecteurs du travail «d'avoir un intérêt direct ou indirect dans les entreprises placées sous leur contrôle». Dans la plupart des pays, cette interdiction est inscrite dans les conditions de service des fonctionnaires et dans des dispositions particulières.

Secret professionnel

Les inspecteurs « sont tenus, sous peine de sanctions ou de mesures disciplinaires appropriées, de ne pas révéler, même après avoir quitté le service, les secrets de fabrication ou de commerce ou les procédés de travail dont ils auraient eu connaissance dans l'exercice de leurs fonctions ». Les inspecteurs sont généralement tenus au secret en raison de leur qualité de fonctionnaires, conformément aux dispositions légales applicables à la fonction publique. Cette obligation est souvent reprise dans l'engagement écrit qu'ils doivent signer ou le serment qu'ils doivent prêter lors de leur entrée en fonction. Ils promettent d'observer le secret, non seulement pendant la durée de leur emploi, mais à vie.

Discrétion quant à la source des plaintes

Les inspecteurs « traiteront comme absolument confidentielle la source de toute plainte et ne donneront aucune indication à l'employeur ou à son représentant qu'une visite d'inspection a été effectuée à la suite de la réception d'une telle plainte ». Cette obligation découle du double souci de protéger les travailleurs ayant porté plainte et de rendre plus efficace le travail de l'inspecteur. C'est contraignant. Comme les obligations précédentes, elle fait généralement l'objet d'une disposition légale ou d'une clause dans les conditions de service des inspecteurs et figure normalement dans les engagements qu'ils prennent lors de leur prestation de serment.

Indépendance des inspecteurs

Il s'agit à la fois d'une obligation imposée aux inspecteurs et d'une garantie qui leur est accordée. Les conventions nos 81 et 129 prévoient que « le personnel d'inspection doit être composé d'agents publics dont le statut et les conditions de service sont tels qu'ils soient assurés de la stabilité de l'emploi et qu'ils soient indépendants des changements de gouvernement et des influences extérieures indues », tels que celles que pourraient tenter d'exercer certains chefs d'entreprise peu scrupuleux ou certains éléments politiques.

Inspection préventive du travail

A la fin du XXe siècle, nombre d'institutions de la politique du travail et de la politique sociale, souvent nées, comme l'inspection du travail, au XIXe, très soucieuses et intéressées par la fonction de prévention, connaissent des mutations profondes, rapides et dramatiques. changements. Ces changements sont dus à une combinaison de facteurs internes et externes – politiques, sociaux, économiques, administratifs et technologiques. Ils auront un impact profond sur le rôle, la portée et les fonctions respectifs de ces institutions, leurs relations entre elles et avec leurs principaux clients à l'aube du XXIe siècle. Il est nécessaire de comprendre et d'analyser la nature de ces changements, la façon dont ils affectent la capacité, la performance, l'impact et les relations des principaux acteurs, et la réalité sociale dans laquelle ils opèrent.

La prévention dans le contexte de la protection du travail et le rôle de l'inspection du travail à cet égard sont mentionnés dans de nombreuses normes internationales du travail (par exemple, les conventions de l'OIT nos 81, 129, 155, 174 et autres). Cependant, les instruments relatifs à l'inspection du travail (conventions n° 81 et 129, et recommandations n° 81, 82 et 133), bien que généralement propices et promouvant des principes de prévention, n'abordent spécifiquement la question qu'au stade pré-travail (cf. paragraphes 1 à 3 de la recommandation n° 81 et paragraphe 11 de la recommandation n° 133).

Depuis l'adoption de ces normes d'inspection du travail (dont notamment la convention n° 81 sur l'inspection du travail dans le commerce et l'industrie a acquis un caractère universel par sa ratification par près de 120 Etats membres de l'OIT), la notion de prévention a considérablement évolué. Parler de prévention implique d'abord un effort déterminé pour éviter les incidents, les accidents, les disputes, les conflits, etc. Cependant, ce qui s'est produit et a fait l'objet d'interventions et de sanctions est beaucoup plus facilement documenté, mesuré et valorisé que ce qui a été évité. Comment mesurer le nombre et l'effet des accidents qui n'ont pas eu lieu ? Et comment montrer des preuves d'efficacité et d'efficience en conséquence, et comme preuve de réussite ?

Aujourd'hui, l'orientation préventive en tant que paradigme de la politique sociale et du travail vise l'objectif général de permettre aux individus de mener une vie longue, productive et en bonne santé, et ainsi de réduire les coûts en croissance exponentielle des différents éléments de la sécurité sociale pour les individus, les entreprises et à la société. En outre, la prévention dans le monde du travail est de plus en plus identifiée non seulement par des avantages à court terme, mais comme un soutien et un maintien de la capacité de travail, de la productivité et de la qualité, de la sécurité de l'emploi, etc., et est donc de plus en plus considérée comme une condition préalable décisive à une individu de mener une vie digne dans la société. La prévention est ainsi définie comme un concept holistique « ouvert » ou pluraliste visant à éviter une multiplicité de risques sociaux, techniques, médicaux, psychologiques, économiques… et dont l'efficacité dépend de plus en plus de la reconnaissance, de l'analyse et de la prise en compte d'indicateurs précoces.

L'expérience très considérable de l'OIT en matière de coopération avec ses mandants du monde entier au cours de la dernière décennie montre que le passage d'un concept relativement rigide de contrôle réactif à un concept de prévention anticipative conduit invariablement à des progrès substantiels dans les activités de l'administration du travail et dans les résultats obtenus. Mais ce corpus d'expériences a également montré les difficultés à réaliser cette indispensable évolution et à maintenir son orientation face à une multitude de facteurs d'entrave divers.

De plus, l'efficacité de toute politique de prévention nécessite la participation de toutes les parties et personnes directement concernées. Elle doit donc souvent passer par l'implication des représentants des partenaires sociaux organisés et leur engagement dans de telles initiatives. Les objectifs de prévention poursuivis doivent, en outre, être pleinement intégrés dans le système d'objectifs des entreprises concernées. Cela inclut à son tour la participation active, voire le leadership, de la direction. De telles conditions sont loin d'être remplies dans le monde ou même dans les économies de marché les plus avancées industriellement.

De plus, les contraintes budgétaires qui pèsent désormais partout sur les gouvernements (dans les pays en développement comme dans les pays développés), et donc sur les moyens dont disposent les administrations du travail et leurs services extérieurs et l'inspection du travail (voire de manière souvent disproportionnée), risquent de mettre en péril ou d'affaiblir ces les (ré)orientations politiques, car elles sont, du moins au début, coûteuses en temps et en ressources et, comme déjà mentionné, difficiles à mesurer et donc à justifier.

Cependant, dans les pays industrialisés, les coûts économiques et sociaux de la non-prévention deviennent partout incontrôlables, atteignant des niveaux financièrement inabordables et politiquement inacceptables. A cela s'ajoute la reconnaissance croissante de l'insuffisance générale des interventions correctives ex post factum. Cela a conduit à la conclusion que les éléments préventifs de tout système de protection sociale et du travail doivent absolument être renforcés. En conséquence, une large discussion aux niveaux national et international a commencé en vue de développer des concepts valables et pratiques pour l'inspection préventive du travail.

Le rythme de plus en plus rapide du changement et de l'innovation dans tous les aspects du monde du travail - relations sociales, organisation du travail, technologie de production, conditions d'emploi, informatique, nouveaux risques, etc. - crée un défi croissant pour les inspections du travail. Les inspecteurs doivent non seulement se tenir au courant des évolutions dans des domaines de plus en plus complexes, divergents et de plus en plus spécialisés nécessaires à leur compétence, ils doivent en effet anticiper les tendances et les évolutions et être capables d'identifier et de comprendre rapidement leurs conséquences en termes de protection du travail, et ainsi développer et mettre en œuvre de nouvelles stratégies de prévention.

Dans le monde du travail, l'inspection du travail est l'un des instruments les plus importants (sinon le plus important) de présence et d'intervention de l'État pour concevoir, stimuler et contribuer au développement d'une culture de la prévention dans tous les aspects de sa compétence : relations industrielles, conditions générales de travail, sécurité et santé au travail, sécurité sociale. Pour que les inspections accomplissent avec succès cette tâche primordiale, elles doivent réorienter leurs politiques, influencer la réforme de la législation, des méthodes, des relations, etc., vers le développement d'une capacité de prévention, interne et externe. Cela concerne à la fois les politiques et les méthodes que l'autorité d'inspection doit suivre, ainsi que les méthodes d'inspection sur les lieux de travail à adopter par les inspecteurs.

Les principaux facteurs déterminants dans ce contexte sont les défis et les pressions exercées sur l'inspection du travail par le contexte économique, politique et administratif. Ceux-ci sont généralement décrits par des concepts tels que la déréglementation, la privatisation, l'ajustement structurel et les tests de marché. Ces politiques tendent en pratique à rendre le travail de l'inspection du travail plus difficile et complexe, bien qu'elles puissent également constituer un moteur d'innovation. Cependant, ils ont régulièrement tendance à exacerber les insuffisances de ressources, généralement déjà chroniques. La protection du travail doit donc également chercher des ressources alternatives pour développer sa propre contribution à la prévention.

A terme, il s'agit de développer une « culture de la prévention » globale et pérenne dans les lieux de travail (et dans la société), prenant en compte les dynamiques d'évolution des rapports sociaux au sein de l'entreprise, les remises en cause des notions traditionnelles d'autorité et de légitimité qui naissent des évolutions attitudes, dans l'organisation du travail, etc., les niveaux généralement plus élevés (et toujours en hausse) de formation et d'éducation tant chez les employeurs que chez les travailleurs, les nouvelles formes de participation qui créent un environnement favorable, etc. Tous ces éléments exigent de nouvelles formes de coopération de la part de l'inspection du travail avec les employeurs et les travailleurs et d'autres institutions, non seulement en ce qui concerne l'application des normes et réglementations de protection du travail, mais aussi en vue d'atteindre le respect intégral des objectifs préventifs de la nouvelle politique de protection sociale et du travail et législation.

 

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Lire 11526 fois Dernière modification le lundi 27 juin 2011 09:24

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